mardi

Deux hypothèses de construction du sonnet des "voyelles".

Peu de poèmes ont fait couler autant d'encre que le sonnet "voyelles" de Rimbaud. La dernière interprétation en date remonte à un article de la revue "télérama" de 2004. Selon cette "interprétation", il n'y a "rien" dans le poème de Rimbaud (sous entendu : pas de second niveau). C'est possible, bien que ce point de vue sacrifie à une vision matérialiste (donc paresseuse) des choses.
Les deux hypothèses que je propose n'ont pas valeur d'explication. Elles se fondent seulement sur la sémantique des mots, non sur les images (ce ne sont pas des interprétations). Il est probable qu'aucune des deux ne soit vraie, moins probable qu'une sur les deux soit vraie, invraisemblable que les deux soient vraies.

1 Rimbaud a construit son poème à partir d'une liste de mots contenant l'une des cinq voyelles, et qu'il faut retrouver. Je propose la liste suivante :

Pour A noir : carapace (cuirasse), carcasse, caverne.

Carapace (cuirasse) : noirs corsets velus ... (à noter que "corset" est un sous-vêtement féminin et non le corps de l'insecte, qui se dit "corselet").
Carcasse : autour des puanteurs cruelles.
Caverne : golfes d'ombre.

Pour E blanc : clair, éclairer (éclair), émir, émoi (émotion).

Clair : candeur des vapeurs ...
Eclairer (éclair) : lances des glaciers ...
Emir : rois blancs.
Emoi (émotion) : frissons d'ombelles.

Pour I rouge : indigo (incarnat), phtisie, rire (sourire), ire (pire), religieux (irreligieux).

Indigo : pourpres.
Phtisie : sang craché.
Rire (sourire) : rire des lèvres belles ...
Ire (pire) : dans la colère ou les ivresses ...
Religieux (irreligieux) : les ivresses pénitentes.

Pour U vert : lune (lunaire), flux et reflux, culture, étude.

Lune (lunaire) : cycles.
Flux et reflux : vibrements divins des mers virides.
Culture : paix des pâtis semés d'animaux.
Culture (étude) : paix des rides que l'alchimie imprime ...

Pour O bleu : cor (son), sonore, cosmos, oculaire, occulte.

Cor (sonore) : suprême clairon ...
Cosmos : silences traversés ...
Oculaire (adjectif) : rayon de ses yeux.
Oculaire (nom) : rayon violet de ses yeux (observation d'une étoile, peut-être l'étoile polaire).
Occulte : O l'Oméga.


2 Rimbaud évoque les couleurs manquantes par déplacement d'une voyelle sur la suivante.

Décrire les couleurs par des mots commençant par la voyelle associée eut été simpliste de sa part. Le poète a parlé de "naissances latentes". Je crois qu'il faut comprendre par cette expression que le lecteur doit s'interroger sur d'éventuels développements du système présenté dans le premier vers du poème.

- Evocation du gris par déplacement de "A noir" sur "E blanc" :

Candeurs des vapeurs et des tentes / Lances des glaciers fiers, rois blancs, frissons d'ombelles.

- Evocation du rose (et peut-être de la rose) par déplacement de "E blanc" sur "I rouge" :

... Pourpres, sang craché, rire des lèvres belles / dans la colère ou les ivresses pénitentes.

- Evocation du jaune et du marron par déplacement de " I rouge" sur "U vert" (rouge + vert = jaune en optique, rouge + vert = marron en peinture) :

U, cycles, vibrements divins des mers virides / paix des pâtis semés d'animaux, paix des rides / que l'alchimie imprime aux grands fronds studieux.

- Evocation du cyan par déplacement de "U vert" sur "O bleu" :

O, suprême clairon ...

Ce "suprême clairon" suffit à lui seul à assurer la transition, d'autant plus que le clairon est un instrument en forme de U.

- Evocation du magenta par déplacement de "O bleu" sur "I rouge" :

Pourpres, ...

- Evocation du bleu sombre par déplacement de "O bleu" sur "A noir" :

Noirs corsets ...

A noter que l'adjectif "violet", au dernier vers, contient le " i " de rouge et le "o " de bleu.

Synthèse :

A = noir (nuances de noir)
E = blanc (argent, gris)
I = rouge (magenta, rose, orangé)
U = vert (jaune, or, marron)
O = bleu (cyan/violet)

Selon cette deuxième hypothèse, Rimbaud tente, par déclinaison phonétique, d'instaurer une vision polyphonique de la couleur (couleurs secondaires, nuances, matière ...).

La série ROUGE/VERT/BLEU renvoie à la série des émaux en héraldique. Les constructeurs de vitraux n'ont pas attendu Newton pour ranger la couleur VERT dans les couleurs primaires. En effet, si l'on superpose, devant une source de lumière, un calque rouge et un calque vert, on obtient du jaune (couleur secondaire en optique).
Rappelons le système de Rimbaud :
Voyelles : ordre des voyelles dans l'alphabet grec (inversion de O et de U latins pour avoir la terminaison Omega).
Couleurs : la série complète des émaux, de noir à bleu, en intercalant le complémentaire de noir, blanc (argent), le jaune (or) étant évoqué de façon "latente" par le procédé décrit plus haut.

Une correspondance rigoureuse (non symbolique comme chez Rimbaud) devrait tenir compte de la fréquence des voyelles. A la voyelle la plus grave correspondrait la couleur noir, à la voyelle la plus aigüe correspondrait son complémentaire, le blanc.
Les principaux sons vocaliques se résument à huit (de plus grave à plus aigu) :

ou/o/a/è/eu/u/é/i

En associant les couleurs "froides" aux voyelles graves et les couleurs "chaudes" aux voyelles aigües, on aurait la correspondance suivante :

ou : noir
o : violet
a : bleu
è : vert
eu : jaune
u : orangé
é : rouge
i : blanc

Dans le poème de Rimbaud, les sons I et U, aigus, justifient sans doute "la colère ou les ivresses pénitentes" ainsi que les "cycles, vibrements divins des mers virides". Le U (orangé) de "suprême clairon" est magnifiquement présent. E est un son médium, adapté à la description de "E blanc", qui évoque la lumière calme. O et A, voyelles graves, sont également pertinentes dans "A noir" et dans "O bleu".

L'ensemble vide est élément de lui-même

Démonstration


Soient un ensemble E et une partie P de E.

Si P est une partie unique de E, alors P est inclus dans E et E est inclus dans P : P et E sont égaux.

Considérons P(E). Il contient un élément, E. Par définition, l'ensemble de ses parties P(P(E)) est donc : 2 ^ 1 = 2.

Or P(E), comme E, contient une partie unique, P, puisque nous aurions autrement deux fois l'ensemble vide (E), ce qui contredirait son unicité.

Etant donné que E = P, P est simultanément partie et élément de P(E).

Par conséquent, P(E) est un ensemble élément de lui-même : si E appartient à P(E) alors P(E) appartient à E.

D'où : P(E) = E.

P(E) est un ensemble vide.
Il n'existe aucun ensemble non vide pouvant contenir seulement l'ensemble vide.

- Considérons P(P(E) : {§, {§}}. Cet ensemble contient en fait deux fois l'ensemble vide, car {§, {§}} retranché de {§} donne {§}. Donc {§, {§}} = {§} + {§} = {§, §} = {§}.
P(P(E) est égal à P(E).
L'axiomatique § différent de {§} ne peut définir un ensemble.

- E est élément vide de P(E), puisque l'ensemble vide (§) est élément de P(E).
Si P(E) est non vide, E doit être non vide, sinon : {§} = { } = §.
L'élément vide (§) n'appartient à aucun ensemble non vide.
L'ensemble vide (§) ne contient aucun élément non vide.
Puisque § est unique, on dira que {§} est l'ensemble de l'ensemble vide. Il s'agit bien de l'ensemble vide élément (vide) de lui-même.

- Le cardinal de l'ensemble des parties de tout singleton X est : 2 ^ 1 = 2.

P(X) = {X}, §

Si le singleton est l'ensemble vide ({}), on a :

P(X) = {}, § = §

Le singleton vide contient un élément vide, lui-même, et il est égal à l'ensemble de ses parties :

§ = {§}

Donc : l'ensemble des parties d'un ensemble comptant l'ensemble vide parmi ses éléments est :

(2 ^ n) - 1